La vie heureuse
La vie heureuse
Compte rendu de la séance de livre échange du 19 décembre 2024
La vie heureuse – David Foenkinos
Pour certain.e.s d'entre nous la vie heureuse est une utopie. Changer de vie est très à la mode aujourd'hui. Mais est-ce possible ? D'autres lecteurs.trices font observer que ce désir a toujours existé. Il a toujours existé des gens qui avaient envie de changer. Suivant les époques et les situations sociales, changer est plus ou moins facile, plus ou moins accessible. Changer exige aussi du courage. Il faut avoir le courage de changer.
Une lectrice, sur la base du lieu principal de l'action, s'est intéressée à la Corée et à l'histoire de ce pays. Elle signale particulièrement le document Femmes de dictateurs de Diane Ducret. La culture coréenne est très différente de la culture française. Dans ce pays le stress au travail est très important car socialement il est impératif pour chacun de réussir. Le taux de suicide est très élevé (26 pour 100 000 contre 14 pour 100 000 en France). Ces particularités culturelles peuvent expliquer pourquoi des expériences d'enterrement ont été mises en place afin de tenter de prévenir les suicides. Des lecteurs.trices se souviennent d'une émission télévisée qui présentait des femmes pêchant des coquillages en apnée au Japon (femmes Amas).
A ce moment des échanges une partie de lecteurs.trices se demandent si ces faux enterrements sont bien réels. Effectivement depuis une vingtaine d'années de faux enterrements sont organisés en Corée, que ce soit en salle ou en pleine nature (l'une des entreprises qui organisent ces évènements s'appelle "Happy Dying" - cela ne s'invente pas). "En enfermant ainsi les participants dans un cercueil, on leur donne l'occasion de faire le point sur leur existence. Ils méditent sur la mort et réalisent que la vie est belle." explique Kim Ki-Ho qui a eu l'idée de ces fausses funérailles alors qu'il écrivait une thèse sur la méditation et la mort. Cela peut surprendre et pourtant ces faux enterrements connaissent un grand succès. Ainsi Happy Dying en organise environ 300 par mois.
Un participant indique qu'en France on peut depuis de très nombreuses années utiliser des caissons d'isolation sensorielle (aujourd'hui appelés caissons de flottaison). La personne peut rester ainsi plusieurs heures dans une eau salée à la température du corps. Cela favorise une détente très complète, en particulier musculaire. Le corps libère alors des endorphines qui atténuent la douleur et les états anxieux et dépressifs.
Une lectrice rapporte un autre type d'expérience pour mettre l'individu en situation mais sans risque. Ainsi pour faire prendre conscience du risque d'accident routier, un enseignant a-t-il eu l'idée de simuler un faux accidents. Les participants s'interrogent sur les risques de traumatisme pour les personnes qui croient assister à un vrai accident. Il y a peut-être des limites à rechercher.
La plupart des lecteurs.trices se posent la question : est-on plus heureux après avoir expérimenté la mort ? Les uns pensent que oui, et les autres que non.
Un lecteur précise que, pour lui, le facteur le plus important n'est pas de rester un certain temps dans le cercueil, mais ce qui précède cet acte. La personne doit rédiger son épitaphe et une lettre d'adieu à ses proches. A ce moment-là elle est obligée de faire un bilan de sa vie, de ses espoirs, ses regrets, ses rêves, ses désirs, ses frustrations. Pour lui, c'est le point majeur de cet acte thérapique.
La discussion revient alors sur l'histoire elle-même et plus particulièrement sur le changement de posture d'Eric quand il est à Séoul. Pourquoi cette cassure, ce revirement ? Les causes sont multiples. Il y a tout d'abord le stress du travail. Il y a aussi le poids de la mère qui est triste, malheureuse et qui reproche à son fils la mort du père. Certaines lectrices considèrent que c'est là le facteur principal. D'autres pensent que le stress au travail peut conduire à une telle décision. Nous sommes tous d'accord pour considérer que les circonstances du passage à l'acte sont essentielles. Il faut à la fois que le stress et le mal-être soient très forts et, à un moment donné, un facteur déclenchant. Dans l'histoire ce facteur est la vue d'une enseigne à la fois accrocheuse et mystérieuse.
Les échanges concernent ensuite Aurélie et le stress qu'elle subit et manifeste au travail. Cela alimente une longue discussion sur le haute fonction publique et les lobbyistes. Alfred Sirven et l'affaire Elf sont mentionnés au passage. Les enquêtes de Victor Castanet : Les fossoyeurs et Les ogres sont également citées. Ces scandales révoltants alimentent la discussion.
La discussion sur l'héroïne, Aurélie, reste succincte et se limite à nos échanges sur la haute fonction publique. La surcharge de travail, le stress permanent et l'ambition démesurée peuvent déstabiliser n'importe quel être humain. Quand elle est remerciée, elle subit une importante humiliation. Le récit souligne bien aussi les jalousies qui dénaturent les rapports entre hauts fonctionnaires.
Cela nous amène à la fin du livre. Pour une partie des lecteurs.trices, cette fin est un peu rapide. Elle paraît bâclée d'une certaine façon. D'autres sont plus mitigés, même si cette conclusion qui voit Aurélie et Eric se retrouver, est convenue.
Globalement, ce roman nous apparaît sympathique. Il a été plus ou moins apprécié par chacun. Du même auteur des lectrices ont préféré Charlotte qui raconte l'histoire de Charlotte Salomon, d'autres ont beaucoup aimé Le mystère Henri Pick. Nous notons tous que c'est un roman très actuel.
Avis et commentaires